Les risques du procédé
Au-delà des clichés qui sont véhiculés, le placement de produits alcoolisés pose une vraie question par son aspect le plus vil et le plus mercantile: l’influence qu’il exerce sur nos pauvres cerveaux empreints de pureté (si,si).
À titre d’exemple, votre serviteur a commencé à fumer du haut de ses 16 ans, pour faire comme Bruce Willis dans "Die Hard" (Bruce fumait avec une délicieuse nonchalance, il fumait quasiment sans en avoir l’air), tout persuadé que j’étais de devenir un homme et par conséquent de pouvoir plaire aux filles. Je peux affirmer aujourd’hui que cette imagerie m’a mené au tabagisme, parce qu’elle m’a cueilli au bon moment.
Il est évident que ces images présentant un coup de blues alcoolisé comme le sommet de la hip, ou le verre de vin de la warrior et le Whisky du battant, comme l’ultime rempart à la souffrance, représentent un risque très concret sur les esprits les plus malléables. En 2009, une étude américaine menée auprès d'un échantillon de 38’000 adolescent·es, démontrait clairement le lien de cause à effet entre la surreprésentation de l’alcool dans les séries et la consommation. Et ce sont bien 90% des productions audiovisuelles qui comportent des événements impliquant de l’alcool! Dis-moi ce que tu regardes, je te dirai ce que tu bois.
Plus c'est gros, plus c'est bon
Hormis Game of Thrones, où le vin est un symbole de puissance et/ou de décadence, dans l’univers enchanté des séries, l’homme boit plus fort. Les spiritueux on la part belle. Il en ressort une image décomplexée et virile (et d’un autre temps.) Prenons pour exemple, la série "Boston Legal" qui conclut tous ces épisodes par un verre de scotch entre les deux protagonistes centraux ou les fioles de whisky dans l’excellente série policière "The Wire." Boire fort, c’est vivre fort, encaisser la vie et être un bonhomme, un vrai… Sans parler de "Mad Men", où ils picolent quasi sans conséquences du matin au soir, juste parce que c’est normal (et cool?)
Finalement l’imagerie de l’alcool et les personnages masculins sont encore dans des schémas archaïques qui rappellent le rapport entretenu avec les armes. Imagine-t-on Clint Eastwood avec un petit flingue de poche ? Ou Stallone avec un lance-pierres ? Non. Il faut du lourd, du solide, de la sulfateuse qui décoiffe. Je prendrai une vodka, merci.
L'accessoire de la femme accomplie?
On peut sérieusement se demander combien cette imagerie romantique de la femme, de ses souffrances, n’a pas participé à l’essor formidable des verres d’afterwork (même le terme est un anglicisme) entre copines. Une habitude encore rare il y a 15 ou 20 ans. Entre temps, Bree et consorts sont passées par là, influençant toute une génération. Grâce aux séries et au vin (à condition d’avoir un verre démesuré), vous pouvez vivre le rêve américain. Reste à savoir lequel.
Et puis il y a les cocktails qui renvoient à une imagerie beaucoup plus festive, voire libertine. On pense naturellement aux Cosmopolitains de Carrie Bradshaw et toute sa clique de Sex and the City. Ici, on boit avant tout pour festoyer, pour oublier, avec un cynisme tout new-yorkais, en se riant des mésaventures vécues. L’alcool dans les séries nous tend un miroir aux alouettes, auquel l’on peut céder, ou non. Question de volonté et d’âge, probablement.
Les femmes et l'alcool, à l'écran
Le vin a une position prépondérante dans les séries américaines et plus particulièrement concernant les personnages féminins. Les stéréotypes se sont doucement installés et c’est ainsi que la femme de pouvoir, ou qui accompli de grandes choses, préfère un verre de vin, si possible dans un verre surdimensionné (qu’elle assume du haut de son élégance.) La femme en tailleur entre dans son loft, épuisée et heureuse de sa journée de dur labeur, puis se vautre avec grâce, et un brushing impeccable, dans son sofa pour siroter du Chardonnay, l’air concerné. Un grand classique des séries américaines contemporaines, à l’image de Alicia Florrick dans "The Good Wife", des héroïnes de Lipstick Jungle ou Claire Underwood dans "House of Cards". L’antithèse, en somme, de la gentille Samantha, femme au foyer de la série des 60’s, "Ma Sorcière bien aimée."
La femme au foyer a également le vin en poupe. Mais l’alcool y est plus triste, une béquille pour pallier sa solitude ou pour lui permettre d’exprimer ses pensées les plus secrètes. On pense bien sûr à Bree Van De Kamp de "Desperate Housewives" ou Sue Ellen dans "Dallas". Le vin permet de raconter visuellement une mélancolie mais surtout, une mélancolie classieuse. Et c’est ce genre de détails qui permet à un certain public d’aimer puis de s’identifier à un personnage.
Pourquoi l'alcool est-il le roi des séries?
D’abord, pour les financer, comme dit plus haut, ensuite pour en faire la promotion et enfin, parce que c’est un élément éminemment quotidien, que connaissent quasiment tous les spectateurs et qui permet dès lors de s’identifier. De plus, le pouvoir des marques est tel, qu’inconsciemment nous les relions rapidement à un style de personnes. Cela permet de communiquer des informations sur un personnage, sans pléthore de dialogues puisque nous le percevons différemment, dès lors qu’il boit une Bud en cannette, un Martini, ou un grand verre de Chardonnay. Les séries devant raconter vite et bien, un élément visuel comme celui-ci est une bénédiction. Aussi l’alcool est un ressort dramatique dont peuvent découler bien des événements, qu’ils soient tragiques ou drôles.
Sans détour
Revoir aujourd’hui Le Gendarme et les Extra-terrestres (1979) est à ce titre tout à fait édifiant. En effet, une partie du film se déroule alors qu’une kermesse se tient en ville. Apparaissent alors à l’écran, un nombre incalculable de marques en gros plan, ainsi que des slogans audios incessants, vantant les mérites de tel ou tel produit. Les Gendarmes eux-mêmes s’en amusent. Si ces images n’apportent strictement rien au récit, il en est tout autre dans les séries actuelles. Aujourd’hui l’alcool raconte; et fait son autopromotion en douce, l’air de ne pas y toucher. "Pour réduire l'humanité en esclavage, la publicité a choisi le profil bas, la souplesse, la persuasion." écrivait Frédéric Beigbeder, ancien publicitaire.
À l’heure du streaming à tout va et du binge-watching, RELAIS DU VIN & CO vous invite à un tour d’horizon de l’alcool dans les séries. Qui boit du vin à l’écran et pourquoi? Que raconte l’alcool sur nos personnages préférés? Quelle influence sur nous, téléspectateurs innocents? Autant de questions auxquelles nous tentons de répondre, zapette en main.
Je t'aime, moi non plus
L’alcool et l’audiovisuel, une histoire d’amour qui dure de longue date. Il n’est jamais anodin de voir une marque à l’écran (d’alcool ou autre) et il s’agit souvent du fruit d’âpres négociations menées en pré-production, chèrement monnayées au prorata du temps d’apparition à l’écran. Ce procédé, appelé le placement de produits, peut déboucher sur la subtilité ou sur la publicité la plus éhontée qui viendra carrément parasiter le film ou la série.
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